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Forum d'expression libre et responsable sur des sujets d'actualité particulièrement sur le renouveau en Église à la lumière de l'Évangile et de Vatican 11 par l'échange et le partage. annonce gratuite

Une Église à inventer


            J’étais à la recherche d’un sujet pour la prochaine parution du Diaconal  et j’ai retrouvé dans mes archives des notes sur un colloque diocésain tenu  en  octobre 2003 qui avait comme thème « Pèlerin d’une Église nouvelle. Une Église à inventer ». Ce colloque  a été un succès à plusieurs niveaux. Ce fut par ailleurs l’une des dernières apparitions publiques de Roland Leclerc qui animait une table ronde sur le sens du pèlerinage. Notre participation à Gemma et  moi a été d’être à l’écoute des exposés et échanges pour saisir le message que pouvait porter un tel thème. Le présent texte est la synthèse de notre compréhension d’une Église en marche. Ce texte est en quelque sorte notre « carnet de route » de ces deux jours de colloque. Vous y lirez donc surtout des  impressions glanées tout au long des activités.

            Le premier thème à nous être offert a été celui du « marcheur ». Or marcher amène un déséquilibre chez la personne d’où un risque de tomber. La seule façon d’éviter une chute c’est de rester bien assis à ne rien faire.  Mais une telle attitude n’inscrit pas le chrétien dans une dynamique baptismale. Marcher, c’est aller à la rencontre d’un autre ou encore mieux de l’Autre.  En fait, c’est chercher un autre lieu en faisant un pas de plus. C’est aussi une spiritualité qui part de notre expérience ou de celle d’un autre pour faire un pas plus loin. Comme marcheur chrétien, nous avons à proposer à d’autres de construire avec nous des espaces de coexistence. Le chrétien à l’exemple d’Abraham doit devenir un nomade à la recherche de pâturages  et de rencontres autour du puits. Il marche, dans sa condition humaine vers des lieux de convivialité, vers des espaces  d’échanges. Marcher dans la solidarité, c’est être « quêteux » avec d’autres « quêteux », dénudés avec ceux et celles qui ont fait le deuil des brillants oripeaux. Se présenter dénudé devant Dieu, ce n’est pas se présenter nu. C’est se présenter sans artifices, sans cosmétiques, dénudé de tout ce qui est apparat car nous n’avons pas à « séduire » Dieu.  Le chrétien est ainsi un marcheur donc un pèlerin.

 

            Le deuxième thème qui a retenu notre attention est celui du « pèlerin ». Ce chemin, c’est la chance de proposer l’Évangile comme un chemin de liberté. C’est un itinéraire où on est libre et à la recherche de son autonomie. Chacun y trouve une place dans la convivialité et la chaleur humaine. Ce chemin permet de se mettre en route, de sortir de soi, de quitter des habitudes, de dépasser l’existence ordinaire. Si les marcheurs sont traités en simples randonneurs, ils se comporteront comme randonneurs. Or, le marcheur chrétien n’est pas seulement un randonneur. Il est un pèlerin qui va sur le chemin de la vie et qui a décidé de se dépouiller, de se dénuder en allant vers l’Autre par la rencontre avec les autres.  Sur le chemin de la vie le randonneur se laisse guider par la beauté de la nature et ce que lui apporte la vie pour son propre bonheur. Le pèlerin chrétien au-delà des mille et un soucis quotidiens  ouvre son cœur, ses oreilles et ses yeux en vue d’être attentif aux personnes qui cheminent à ses côtés. Si le pèlerin va son chemin avec un sac à dos parfois trop lourd il lui sera difficile d’être  attentif aux autres. S’il traîne avec lui du superflu, des pesanteurs il devient moins disponible. Il doit alors alléger son sac à dos, se débarrasser de l’inutile.   Cette symbolique du sac à dos trop lourd du pèlerin s’applique aussi à l’Église institution. C’est pourquoi nous devons  réinventer l’Église institution.

 

            Nous en venons ainsi au troisième thème retenu « une Église à inventer ». Ici nous utilisons en partie les exposés de Raymond Lemieux pour transmettre le message entendu. Inventer l’Église... N’est-ce pas prétentieux? L’Église n’a-t-elle pas été fondée voilà 2000 ans, une fois pour toute? Pourtant, si on y regarde de près, n’est-il pas dans la nature même de l’Église d’être sans cesse à réinventer? Cette responsabilité ne demeure-t-elle pas celle du peuple de Dieu dans toutes ses composantes. Inventer l’Église aujourd’hui, c’est prendre un risque sur demain. C’est prononcer une sorte d’acte de foi. Le présent, en fait, est un entre deux: entre ce qui n’est plus et ce qui n’est pas encore. Pour faire sens, il exige de visiter le passé les yeux tournés vers l’avenir, de regarder en face ce qui est perdu pour mieux envisager ce qui pourrait venir. Au Québec, le christianisme est blessé. Notre catholicisme est passé d’une position de force à une existence de précarité dans une société pluraliste. Maintenant, il faut passer de la plainte et du pleurnichage du passé à une ouverture  vers l’avenir pour la construction d’une société qui n’est plus celle de nos grands-parents. Pour cette réalisation, il existe une saine critique qui permet à l’Église d’évoluer et de se réinventer. L’Église se doit de développer une attitude plus pastorale que doctrinale. Au lieu de chercher à canaliser, centraliser, récupérer, elle a à être ouverte à une société marquée par la laïcité et le pluralisme dans le respect des convictions de chacun. Nous voulons voir advenir une Église qui respecte les convictions de chacun et ne cherche à régenter personne. 

 

             Voici quelques commentaires écrits par les participants et participantes sur l’ensemble du  colloque: « Dans oser inventer une Église, il faudrait d’abord tenir compte de la personne dans sa réalité d’attente, d’ouverture, de respect et solidarité », « Allez-vous arrêter de dire : des églises qui se vident! Vendez-les, vous penserez à autres choses ». De nombreux commentaires sont venus des ateliers. J’en ai retenu quelques-uns qui me semblent intéressants: « On a beaucoup de chemin à faire pour entreprendre la construction d’une nouvelle Église tant et aussi longtemps qu’on ne parle que de sacrements pour répondre à des demandes extérieures », « Quelques-unes des vraies questions et des belles pistes d’espérance, souffle de vie, comment faire petite communauté »,  « Il faut faire autrement, nous savons quoi faire, mais peu de gens osent vraiment ».  En fait ce  colloque nous invitait à aller au-delà de nos limites à la rencontre de l’Autre en allant à la rencontre des autres sans attendre leur venu ou leur retour dans le «giron » de notre traditionnelle paroisse. Nous avons à signifier un salut possible sans exclusion de quelque nature que ce soit. Parler de salut, nous a dit Raymond Lemieux, dans un contexte où la fin de l’humanité est désormais logiquement envisagée comme l’aboutissement probable de la perte du goût de vivre, devient ainsi une responsabilité que le christianisme reçoit de façon sans cesse renouvelée. 

 

            Six années sont passées depuis ce colloque et l’Église institution ne se renouvelle pas beaucoup pour ne pas dire pas du tout. Ça va prendre plus que des colloques et des paroles pour que le changement survienne dans le cheminement de cette institution. Mgr Jacques Gaillot, dans son livre en collaboration avec Alice Gombault et Pierre de Locht, Un catéchisme au goût de liberté affirme «Aujourd’hui, nous sommes témoins de la naissance de communautés chrétiennes adultes, composées d’hommes et de femmes formés tant sur le plan profane que sur le plan religieux. Elles souhaitent l’exercice d’une véritable coresponsabilité tant dans le choix des  ministres que dans la gestion de la communauté ou le souci de la mission.» ( p. 222 ) . Si nous osons, nous allons transgresser des lois et mettre de côté de vieilles habitudes de fonctionner. Voici ce que dit du mot transgresser, Mgr Gaillot : «Transgresser, dans le vrai sens du mot, c’est s’avancer au-delà des chemins tracés, dans l’attention à des situations vécues qui exigent des transformations parfois radicales. » ( p. 153 ) Oserons-nous…« pour le bien de la communauté ? » ( p. 152 )

 

 

Robert Hotte,
membre du FAN de TR/N
avec la collaboration de Gemma Lévesque.

 

 

 

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