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La mort de Raymond Gravel, prêtre du diocèse de Joliette, a fait la « une » des médias québécois comme bien peu d’événements « catholiques » peuvent en rêver. Cette nouvelle a connu une couverture médiatique considérable dans une province qui n’a toujours pas fini de « régler ses comptes » avec la religion. Cela mérite réflexion.
Les évêques québécois déplorent le peu de place que les médias font à leurs prises de parole dans l’espace public. Quand ils ont voulu s’opposer une dernière fois à l’adoption du projet de loi 52 sur « mourir dans la dignité », ils ont dû acheter de l’espace publicitaire dans les journaux pour se faire entendre. Ils ont l’impression que les médias d’ici n’ont aucun intérêt pour les questions religieuses.
Et pourtant, Raymond Gravel était régulièrement dans les médias en tant que prêtre, et ce, bien avant sa dernière année de maladie. Pourquoi?
Certains diront que c’est à cause de ses positions rebelles, progressistes ou « différentes » des points de vue officiels ou habituels de l’Église (sur l’homosexualité, l’ordination des femmes, etc.). Cela serait à mon avis une erreur.
Certes, le caractère polémique de certaines prises de positions a pu augmenter l’intérêt des médias. Mais la véritable explication de la présence de Raymond Gravel dans les médias réside ailleurs : dans sa grande disponibilité à l’égard de ces outils de communication certes, mais surtout dans son humilité et dans son humanité profondes qui faisaient de lui un interlocuteur privilégié et attachant, tant pour les médias que pour le grand public.
Si Raymond Gravel avait ses entrées dans les médias et si ceux-ci recherchaient même sa parole, c’est d’abord et avant tout parce qu’il était vu comme un être humain authentique et profond plutôt que comme un prêtre-en-fonction; parce qu’il osait parler selon sa conscience plutôt que selon l’orthodoxie du catéchisme romain; parce qu’il ne pratiquait pas la « langue de bois », ni religieuse, ni politique; et parce qu’il était capable d’une parole claire et forte mais toujours respectueuse de l’autre, de son expérience et de son point de vue.
Ce qui manque à notre Église québécoise, ce n’est pas la pertinence de son message (la Bonne Nouvelle) ni la richesse de son expérience (à travers les siècles et les continents); c’est plutôt l’humilité de n’être qu’une voix parmi d’autres, l’expérience reconnue de ses faiblesses et de ses fragilités, l’ouverture bienveillante aux nouveautés dérangeantes ou aux points de vue contradictoires et la simplicité du partage de notre commune humanité.
C’est ce que Raymond Gravel a personnifié d’une manière exceptionnelle. Et que nous sommes tous invités à développer et à vivre à notre tour. Jésus de Nazareth est toujours une figure inspirante pour notre monde d’aujourd’hui quand ses témoins vivent vraiment à sa manière. Comme Raymond Gravel et le pape François.
Dominique Boisvert
17 août 2014